dimanche 19 juillet 2015

Compte-rendu de la Sortie Forêt de Vizzavona le 20 juin 2015

En cette veille d'été, Achille nous a donné rendez-vous au col de Vizzavona pour un cours de Sylviculture. Nous passons donc la matinée dans la hêtraie en sa compagnie.

Plusieurs stades visibles :
annuelles, vivaces épineuses et forêt
En introduction Achille rappelle que la forêt est le stade ''terminal'' de la végétation. Nous observons, sur une zone non boisée, un des premiers stades de colonisation par la végétation : celui des plantes annuelles. Cette zone du coté Nord de la route a une végétation qui est maintenue basse par l'action de l'homme (parking) et pâturage de quelques herbivores divagants. 
Le stade suivant correspond à l’apparition d’espèces vivaces qui vont s’implanter au milieu des annuelles. On voit aussi sur le site, un stade de fruticées, avec plusieurs espèces épineuses, qui échapperont au pâturage et aux animaux sauvages : Églantier (Rosa sempervirens), genêt... le milieu se ferme lentement.
Le stade suivant correspond à l'arrivée des arbres à graines légères, disséminées par le vent, comme le pin ou, à graines plus lourdes, transportées par les animaux (les glands par les geais par exemple).
Enfin, le dernier stade : le milieu forestier, qui correspondra au climax si les conditions climatiques et édaphiques (sols) le permettent. Quand la forêt est vieillie, quand un arbre meurt et tombe, il créé une trouée et le cycle reprend ; mais les semis des arbres occuperont rapidement l’espace ouvert.

Les résineux, notamment les pins, supportent des sols peu profonds voire pauvres, au contraire du Hêtre, des Chênes et du Sapin. Les forestiers ont l’habitude de classer les essences en « essences d’ombre » et « essences de lumière » par rapport à leur capacité de régénération. Par exemple les pins se régénèrent bien en pleine lumière ; alors que le hêtre et le sapin ont besoin d’un léger couvert pour bien se régénérer. Toutefois, il n'en faut pas trop : l'ombre des hêtres adultes nuit à leurs propres semis.

A Vizzavona, à l'étage supraméditerranéen avec une forte influence montagnarde, les espèces adaptées sont le Hêtre et le Pin laricio. Ces deux espèces sont en effet présentes dans la forêt. Nous sommes ici dans une forêt communale , gérée par l'ONF, elle relève du régime forestier. En 1827, était créé le Code forestier, suite à de graves problèmes d'érosion des montagnes entraînant des catastrophes (Cévennes, Nimes, Alpes...). Il vise à contraindre les communes à une gestion durable des forêts. L’administration des eaux et forêt avait la charge de l'application de ce code, elle est devenue l’ONF (Office national des forêts).

Un taillis régulier de hêtre
Pour les feuillus, on distingue :
- la Futaie : une tige où  fût / du Taillis où plusieurs troncs partent d'une même souche.
- le traitement Régulier : tous les arbres ont le même âge / de l’Irrégulier : plusieurs âges représentés.

La hêtraie située au nord de la route est vielle et constitue un bon réservoir de biodiversité (Chauves-souris). La hêtraie au Sud de la route est plus jeune mais n’est pas dans son optimum stationnelle. A l'abandon, elle a été coupée puis, est devenue une forêt en taillis, qui sont montés très haut : les troncs sont donc nombreux, assez étroits et tordus. En outre, au sol, il n'y a rien (pas de semis), en raison de la densité du feuillage. Elle ne pourra fournir que du bois de chauffage.

Avant de songer à régénérer un peuplement, il faut étudier la station pour y implanter une essence à la fois pertinente du point de vue sylvicole et intéressante économiquement (le meilleur rendement). Ce n'est pas parce qu'il y a déjà une essence que c'est la ''bonne'', notamment si elle a été favorisée par l'homme.

Pour définir la station plusieurs possibilités :
- une étude botanique du site (ici cela va être difficile car il y a peu de plantes au sol),
- une étude pédologique : sol plus ou moins profond.
Les horizons de la litière permettent de nommer l’humus, Ici, la décomposition est assez lente, c'est un humus de type moder. Si la décomposition de la matière organique est rapide l’humus est un mull. Quand la décomposition est très lente et que la matière organique s’accumule on a un humus de type mor.

Mycelis muralis
Coté bota, il faut se fier aux plantes ''indicatrices'' qui nous permettent de caractériser le milieu et ses potentialités et donc de la valoriser au mieux (cf catalogue des stations de l'ONF de Corse). Ici, le cortège floristique est surtout constitué par des plantes de grande amplitude écologique, il y a peu de plantes indiquant les changements de stations.
Quelques plantes indicatrices :
- de sol sec à très sec: disparition de la fougère aigle (Pteridium aquilidium) , qui est une plante de grande amplitude.
- de sol assez sec à assez frais : Pteridium aquilidium, Fraisier (Fragaria vesca), Geranium rotundifolium, Gaillet croisette (Cruciata laevipes), Luzules de Forster (Luzula forsteri) et du Piémont (L. pedemontana), Festuca heterophylla.
- de sol frais : La laitue des murailles (Lactuca muralis  /ex= Mycelis muralis), Sanicle d'Europe (Sanicula europaea), Melica uniflora, le Houx, Renoncule laineuse (Ranunculus lanuginosus),

Ici, le milieu est frais, le hêtre est donc à sa place. En outre, la pente est faible, ce qui lui permettra de croître en station favorable. Alors qu'en face, au nord, le hêtre est dépérissant, montrant qu'il n'est probablement pas à son optimum ; le pin laricio serait plus adapté. 

Achille, notre guide dans la hêtraie
Le hêtre doit être éclaircit rapidement dès qu’il atteint 8 à 12 m de hauteur. On choisi les plus belles tiges (désignation) et on abaisse leur densité. Il faut au moins 3mm de largeur sur le cerne annuel (rayon) sinon le bois est ''nerveux'' et ne peut convenir aux usages nobles. En terrain acide, le cœur du hêtre peut être rouge, ce qui est considéré comme un petit défaut. Un beau bois de hêtre (au moins 6 m de tige droite sans nœud) avec des cernes larges et réguliers peut être vendu 100 euros le m3 pour des meubles ou du placage. Un élagage artificiel permettra d'éviter les nœuds sur les arbres désignés.

Après l'essence, le sylviculteur doit choisir un âge d'exploitabilité, et adapter le traitement pour atteindre ses objectifs (par exemple 60 cm de diamètre, à 80 -120 ans selon la richesse du sol). Plus il y a d'individus, plus les hêtres monteront à la recherche de la lumière et grossiront peu : il faut donc aussi effectuer des éclaircies régulières, qui ont un coût. A la fin de l’exploitation, il y aura 70 à 80 tiges par hectare. La sylviculture du hêtre est très exigeante, c’est elle qui donne sa qualité aux bois produits et les erreurs sont difficiles à rattraper. Ici par exemple, seule l'utilisation du bois pour le chauffage est envisageable. Dans certains secteurs, un rattrapage est envisageable en éclaircissant les jeunes futaies ou les taillis. Les arbres ne doivent pas dépasser un rapport hauteur /diamètre de 100 à 110 sous peine de constituer un peuplement fragile où on ne peut plus intervenir en coupe.



Nous passons alors dans l'Allée des tilleuls (Tillia cordata), plantée le long de l'ancienne route nationale. Sur leur tronc, le lichen Lobaria pulmonaria, signe que même en bordure de route nationale, l'air est encore pur !



Parquet de régénération 
Achille nous présente ensuite un exemple de ''parquet'' de régénération : ici, une coupe rase a été réalisée suivi d'une plantation, car il n'y avait pas de semencier autour, en 1990. Aujourd'hui, on observe des ''gaulis'' (jeunes arbres donc le tronc tien dans une main), qui deviendront ensuite des ''perchis''. Il faudra ensuite éclaircir, c'est à dire enlever les arbres les moins beaux, pour avoir du hêtre de qualité. Attention toutefois à ne pas trop éclaircir, car la lumière ferait repartir les gourmands (→ nœuds), qu'il faudra ensuite élaguer (coût).

Plus loin, une futaie claire, où il y a eu une coupe de régénération. Ces travaux sont prévus par un plan forestier d'aménagement proposé par l'ONF à la commune, visant à atteindre les objectifs fixée par elle. Ce plan de gestion couvre 20 années en précisant les dates des travaux à venir et les crédits d'entretien forestier à prévoir. Le sol est toujours limoneux et parmi les plantes indicatrices de milieu frais, notons, le gaillet à feuilles rondes (Galium rotundifolium), une Epervière (Hieracium  sp.), le fraisier (Fragaria vesca), Mycelis muralis et la Fétuque hétérophylle (Festuca heterophylla) reconnaissable à son toucher rapeux.


La pluie arrivée pour le déjeuner nous a empêché de traiter du Pin laricio l'après midi, mais nous y reviendrons à l'occasion de la sortie à Aïtone en août ! Merci à Bernadette de nous avoir abritée...

Le diaporama de la journée :



Enfin, Bravo à Sandra, qui a découvert un nouveau lichen (toxique et mortel en cas d’ingestion) pour la Corse : Letharia vulpina, sur un pin laricio, il est reconnaissable à sa couleur particulière.


Prochaine sortie Forêt à Aïtone, le 2 août 2015 
A très bientôt !



vendredi 3 juillet 2015

Cette semaine, des conférences de Jacques Gamisans en Corse du Sud




Jacques Gamisans propose 5 conférences début juillet dans toute le Corse du sud.
Une bonne façon de commencer les vacances intelligemment !

Levie: 4 juillet 17h 
Vicu (o): 6 juillet 16 h 30 
Cuzzà (Cozzano):7 juillet 17 h 
Ste Lucie de Portivecchju: 9 juillet 18 h 
Petrusella:10 juillet 18h 30